Psychosociologie d’une adolescence en situation inadaptée (2/3)Psychosociologie d’une adolescence en situation inadaptée (2/3)

Adolescence comme crise

Dans cette partie, nous ferons l’étiopathie des adolescents, afin de replacer leurs symptômes dans une logique développementale.

developpement de ages de la vie

Herméneutique des problèmes adolescents

Nous commencerons cette partie en rappelant l’aspect central du processus pubertaire dans la genèse des problématiques rencontrées.

Tout d’abord, il est malaisé de poser objectivement les contours de la période. Bien sûr, on peut affirmer qu’il s’agit d’un âge de transition entre l’enfance et l’âge adulte. Cependant, l’adolescence est une période de la vie connaissant un allongement et une complexification dans nos sociétés contemporaines.

L'adolescence est une période de la vie pleins de questionements
Super Grave, des Adolescents Préoccupés

En effet, il est fréquent de voir s’allonger le temps de vie au foyer familial (effet « Tanguy ») ou le temps de dépendance à celui-ci (crise d’autonomie).

Ainsi, nous pouvons scinder le processus adolescent actuel en 2 phases :

  • Le processus pubertaire, situé médianement entre 11 et 17 ans.
  • L’adulescence, terme théorisé pour la première fois par le psychothérapeute Tony Anatrella dans Interminables adolescences. Cette classe d’âge, n’ayant pas de frontière bien défini, se fixe communément entre 18 et 35 ans.

Le passage adolescent au scanner Freudien

Le passage adolescent, visité par Freud dans Trois Essais Sur la Sexualité est une transformation pubertaire segmentée en 3 parties : biologique, psychologique et sociale.

C’est dans cette dynamique d’élargissement l’extérieur (enfance -> adulte, sphère privé -> public, protection -> responsabilisation) que se fonde la formation d’espace de rencontre et l’affirmation d’une personnalité.

« L’adolescence est un temps essentiel pour la finition de la personnalité. C’est le temps où le garçon et la fille essayent de se constituer une identité psychosociale et psycho-sexuelle. Pour cela, il se réfère aux normes culturellement dominantes de son milieu d’appartenance ou qui sont pour lui des références.  »

Gérard Guillot, Adolescents dans une société en grande mutation, elle-même adolescente.

La psychanalyse freudienne introduit dans cette évolution une période de latence, de 6 ans à un âge pubertaire mal défini. Elle est là pour désigner une période où le Surmoi va se structurer et où l’enfant va élaborer des mécanismes de défenses.

Conflit entre adolescent et père

Surmoi & Oedipe

Cette période marque une indépendance progressive des parents, des progrès sur le plan de l’intelligence. Il marque aussi l’apparition de nouvelles notions liées au Moi et au Surmoi (culpabilité consciente, remords, pudeur, etc…).

Le Surmoi est censé être « un lieu psychique archaïque habité par l’héritage de l’Oedipe et constitué d’un ensemble introjecté d’énoncés négatifs du types « ne fais pas… » qui rassemblaient les interdits structurants proposés par la famille.

En définitive, il s’agit d’une période de restructuration libidinale. Cela se traduit par un développement de la sublimation et une désexualisation des relations d’objets. C’est le « calme avant la tempête » (calme sexuel ou sexualité « hibernante »). Autrement dit, une phase de « repos » entre Oedipe et génitalité.

Il s’agit d’une période de remaniements psychiques majeures puisque l’image du corps est éprouvée à travers la puberté. La représentation de soi est, de fait, fragilisée. C’est à partir de cette souffrance narcissique que vont naître de nombreux dérèglements.

Les figures parentales œdipiennes perdent leurs colorations idéalisée et se confrontent aux parents réels. Ils sont alors imparfaits, provoquant un vif sentiment de perte et un renoncement aux figures d’attachements initiales.

Un enfant a peur de son père
La Confrontation aux Parents Imparfaits. Shining, Stanley Kubrick

Habituellement, on peut voir ces comportements d’oppositions chez les adolescents pour qui la mise en place d’interdits durant la période de latence s’est mal goupillée. Cela ne permet pas un renoncement efficace et constructif aux objets d’amours œdipiens. Durant cette période, le Moi et le Surmoi s’édifient, ce qui doit susciter chez l’enfant un attrait, une ouverture au monde extérieur si cette période de latence n’est pas perturbée.

Problème face à la temporalité

Cette problématique de la temporalité à l’adolescence est le fruit de nombreux paramètres sociologiques, familiaux, éducatifs et sociétaux. Cependant, il est important de ne pas négliger l’essence de l’adolescence. C’est en investissant ses activités de pensées, en liant « moi passé » et « moi futur » avec un psychologue clinicien.

Pour Joël Croas, l’intégration d’éléments historicisés replacés dans une histoire permettra une prise de conscience permettant l’accès à la saisie d’un présent anticipant le futur ( Temporalité à l’adolescence , mémoire de l’enfance, Le Journal des Psychologue, 2005).

L’AGIR adolescent

Avec l’entrée dans l’adolescence, « l’agir » permet d’être acteur et sujet de son histoire. C’est notamment ce qui va pouvoir provoquer des passages à l’acte (vols, toxicomanie, problèmes de comportements). Cette conséquence de la perte de l’omnipotence infantile et d’un affrontement au deuil de cette première.

Les adolescents sont contraints d’accepter, via le processus pubertaire, la finitude face à l’absolu temporel(l’adolescence correspond habituellement aux premières questions métaphysique).

Le héros du film Orange Mecanique est un adolescent violent
Orange Mécanique, Stanley Kubrick

L’autre est désormais différent, la faillibilité des parents découverte, leurs savoirs remis en cause, le dialogue amoureux et la sexualité génitale apparaîssent. En délaissant les élaborations intellectuelles et affectives, le jeune adolescent risque de se mettre en opposition contre le monde, le temps, les autres « sachants ».

La violence à l’adolescence

La violence de l’adolescent est indissociable de l’intensité des changements intimes du sujet. Sur ce plan, Freud se place d’un point de vue « économique ». Pour lui, la décharge violente de l’ado est décharge de surplus d’excitation psychiques, permettant une satisfaction pulsionnelle immédiate à « bon coût ».

Le rôle du psychologue est d’amener le jeune à investir sa pensée, d’élaborer son désir depuis ses pulsions. Il lui faut accepter de différer la satisfaction pour un gain supérieur, de se permettre d’être soi-même un pare-excitateur.

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